La réponse est simple : a priori, oui. En effet la créativité est reconnue pour être une compétence humaine, ainsi tout le monde en est pourvu au même titre que de jouer au tennis ou d’un instrument de musique. Cela s’apprend et se développe. De là à devenir un Nadal ou un Beethoven, c’est un autre problème.
Lorsqu’on utilise la créativité pour résoudre des problèmes complexes et faire de l’innovation, on constitue généralement un groupe. Pourquoi faire un groupe de créativité ? Il y a trois raisons essentielles :
Un groupe a plus de connaissance que les membres qui le compose.
L’intelligence
Pour l’entreprise, le travail de groupe va permettre de dégager des choix partagés et des cultures communes, sources de motivation pour le développement futur du projet. Ceci ne veut pas dire qu’on ne se trompe pas.
Mais dès qu’on parle de groupe, des mécanismes nouveaux se mettent en place qui peuvent gêner la créativité des membres. La constitution du groupe est donc un élément essentiel de l’efficacité d’un travail créatif.
Ici, je vais parler des postures et attitudes que je rencontre lors de mes activités qui sont des obstacles à la bonne marche du groupe et à l’efficacité du résultat.
’’L’expert’’ : je précise avant tout que je travaille souvent avec des experts très pointus et très créatifs. L’attitude décrite ici ne dépend donc pas d’une fonction ou d’un niveau d’études et de connaissances. ’’L’expert’’ va adopter une stratégie de défense de position ou de territoire. Le premier effet est qu’il aura tendance à monopoliser la parole pour étaler sa science. Il étouffe ainsi l’expression des autres et rend le travail d’animation plus difficile. Chaque fois qu’une proposition sera émise qu’il juge être de sa compétence, ’’l’expert’’ choisira deux possibilités : soit il démontera la proposition allant jusqu’à ridiculiser l’émetteur, soit il rebondira sur la proposition et argumentera jusqu’à ce qu’elle devient sa propriété. Bien entendu, plus aucun membre de groupe n’osera faire de nouvelles propositions spontanées et le mécanisme de la créativité est enrayé.
Le ’’politique’’ : là encore, je ne parle pas de personnes ayant une fonction politique mais de personne qui vont adopter une attitude que j’appelle ’’politique’’. Le profil du ’’politique’’ a ceci de particulier qu’il ne s’intéresse pas aux solutions mais uniquement aux problèmes, qu’il utilise et manipule pour sa propre stratégie. Ainsi, il est capable de minimiser un problème essentiel, grossir un problème mineur, mettre en lien des problèmes qui n’ont rien à voir entre eux, créer ou inventer des problèmes pour faire diversion. Or, la bonne compréhension du problème est essentielle à la bonne efficacité du groupe (voir quel est le problème ?). Le premier effet est donc de perturber ce processus avec trois conséquences : une perte de temps dans la définition du problème, l’installation d’un doute quant à l’utilité du travail à mener qui entraine une démotivation du groupe et parfois l’orientation du groupe dans une mauvaise direction. Le deuxième effet se situe au moment des choix des solutions. Le ’’politique’’ va là encore perturber le processus car il aura tendance à privilégier les solutions qui répondent à ses seuls intérêts. Sa stratégie consiste souvent à remettre en cause les critères prédéfinis et les procédures de choix dans le but de faire ressortir ou éliminer les idées qu’il privilégie.
Le ’’trou noir’’ : c’est un troisième type courant d’erreur de recrutement dans un groupe de créativité. Il a été invité car on a pensé que sa présence était nécessaire, mais lui-même n’a aucune motivation à participer. Le ’’trou noir’’ va souvent rester silencieux. Il manifestera sa mauvaise volonté à participer aux activités proposées par sa seule attitude. Ses contributions seront principalement négatives, expliquant à chaque idée pourquoi elle ne fonctionnera pas ou dénigrant simplement les propositions. L’effet du ’’trou noir’’ est de faire baisser l’énergie du groupe parfois même de l’éteindre.
Vous l’aurez compris, être créatif n’est pas seulement une compétence, c’est aussi une posture intellectuelle. On peut choisir de l’être ou ne pas l’être.